Pourquoi consommer seconde main ?
Ces dernières années, deux phénomènes antagonistes se sont développés : la fast fashion et le slow fashion.
La fast fashion désigne un renouvellement très rapide des collections dans le but de suivre les nouvelles tendances qui se succèdent à un rythme effréné. La durée de consommation du nouveau jeans en vogue sera tout aussi éphémère que sa qualité une fois porté et lavé !
Le slow fashion, en opposition, consiste à appliquer des exigences d’éthique et de transparence sur la chaine de valeur des vêtements (conception, production, consommation), dans un objectif de réduction de l’impact environnemental.
C’est dans cette seconde logique que le marché de la seconde main s’est développé.
La seconde main, et plus largement toutes formes de recyclage textile, offre un moyen concret d’agir positivement sur l’impact environnemental de la mode. Zoom sur ce qu’est la seconde main, quels sont ses acteurs, ses avantages et ses limites.
Le marché de la seconde main
Le marché de la seconde main, un marché qui explose et se transforme
Dans son rapport, ThredUp, le site de friperie en ligne américain prévoit que, d’ici à 2030, ce marché sera deux fois plus important au niveau mondial que celui de la fast fashion. C’est un basculement historique.
« Il faut remonter au XIXe siècle pour retrouver une telle domination de la fripe dans les modes de consommation » Manuel Charpy, historien, chargé de recherche au CNRS et rédacteur en chef de la revue Modes pratiques). « A cette époque, les vêtements déjà portés étaient la norme. Les classes populaires, le plus gros de la clientèle, achetaient en grande partie des uniformes abandonnés par l’armée qui étaient reteints et retaillés. Dès le milieu du siècle, des artistes et des étudiants se sont mis à glaner de vieux vêtements à l’histoire originale, dans une idée de contestation de l’uniforme bourgeois ».
Aujourd’hui, le marché de l’occasion et de la seconde main fait son retour et a le vent en poupe, en touchant cette fois toutes les catégories sociales. Finis le joyeux bordel de la friperie ! Aujourd’hui le secteur de la seconde main s’est stylisé grâce à une demande croissante des consommateurs et une offre digitale.
Les acteurs de la mode seconde main
Selon l'institut Français de la Mode, 40% de la population de l'Hexagone aurait acheté un article déjà utilisé en 2019, un chiffre en hausse de 10 points par rapport à 2018. Ce nouveau segment est en train de transformer durablement le secteur de la mode et de s'ancrer dans le quotidien.
Le marché de la seconde main est porté par des plateformes comme Vinted et Depop, leaders avec leurs plateformes en ligne qui font fureur chez les 15-25 ans.
D’autres enseignes surfent sur la vague de la seconde main en faisant revivre l'atmosphère des années 70, 80 ou 90 non pas virtuellement mais physiquement. On peut citer Kiloshop, MadVintage et Guerrisol.
Mêmes les grands magasins s‘y mettent.
Un nouveau shop-in-the-shop de 500 m2 (le RE(STORE)) qui propose une offre de seconde main de grandes marques, du haut de gamme au plus accessible, a été inauguré au Galerie Lafayette Hausmann à Paris en septembre 2021. C’est un véritable symbole pour cet acteur référent du luxe et de la mode chic parisienne qui alloue une place de choix pour les marques actrices de circularité. On y trouve les marques de la seconde main (La Petite chineuse, Entremains, Monogram), celles qui retravaillent des fins de série ou des surstocks de tissu (Patine, Barje, La Bonne Pioche, Marianna Ladreyt), et aussi des services pour déposer ses anciens vêtements et ainsi les revendre, les recycler ou les personnaliser.
Le grand magasin Printemps Hausmann consacre lui aussi un nouvel espace de 1 300 mètres carrés à la circularité ouvert en septembre 2021. Il regroupe une offre vintage, un service de rachat de vêtements et un panel de marques engagées en matière d'écoresponsabilité. Un label a même été créé « Unis vers le beau responsable », qui analyse les performances des marques en matière de durabilité. Il est structuré en neuf thématiques allant du sourcing à la logistique, en passant par la promotion de l'économie inclusive et l'innovation.
Cet élan est notamment porté par des initiatives des marques. Le groupe H&M promet ainsi qu'en 2030, il va « utiliser uniquement des matériaux issus de sources durables ». De son côté, Uniqlo veut : « éliminer le plastique à usage unique tout au long de sa chaîne d’approvisionnement ». Un « fashion pact » a été signé par plus de 60 entreprises du secteur de la mode et du textile comme Celio, Mango, Promod ou Nike et présenté le 26 août 2019 aux chefs d'État réunis au sommet du G7 à Biarritz. Les objectifs sont ambitieux et centrés sur trois thématiques : l’enrayement du réchauffement climatique, la restauration de la biodiversité et la protection des océans.
Alors en tant que consommateur quels sont ses avantages ? Consommer seconde main est-ce vraiment écologique ?
Pourquoi acheter / chiner seconde main ?
Pourquoi acheter ses vêtements en seconde main ?
Nous remplissons de plus en plus nos placards d’articles d’occasion. Et c’est une bonne nouvelle car les considérations sont nombreuses.
- Elles sont écologiques
Selon une étude Thred up, si chaque citoyen aux Etats Unis convertissait l’achat d’un article neuf pour un article d’occassion, cela équivaudrait à retirer un demi-million de voitures du marché.
La seconde main, tout comme le recyclage textile, offrent un moyen concret d’agir positivement sur l’impact environnemental de la production et de la consommation vestimentaire.
Le vêtement le moins polluant étant celui qu’on ne produit pas, la seconde main est une alternative favorisant la consommation éco responsable.
- Elles sont économiques
C’est une raison non négligeable de consommer seconde main. Le prix d’un vêtement seconde main étant plus bas que celui de ce même vêtement neuf, et si vous participez jusqu’à bout à la boucle circulaire en remettant des vêtements seconde main en vente sur le marché, à vous les économies !
Le terme chiner prend tout son sens quant au-delà du style et de l’histoire du vêtement, vous pouvez dénicher des bonnes affaires.
Mais attention, l’achat doit être raisonné, le vêtement acheté en vue d’être consommé sur du long terme et nous apporter un réel attachement émotionnel.
- Elles concernent la diversité de l’offre
Il y a plus de vêtement sur Terre qu’il n’en faut pour habiller la planète entière. La seconde main, c’est des années d’histoire sur la mode, des tendances, des créateurs, des styles, des marques, et tout ça au même endroit pour être mixé et créer propre look avec des pièces uniques que vous seul€ porterez.
La seconde main : est -ce écologique ?
Le rapport « Revers de mon look » produit par l’ADEME, transcrit l’impact de chaque de la production textile sur la Terre et les Hommes. Depuis la récolte des matières premières jusqu’au recyclage des vêtements, le cycle de vie du vêtement consomme et détruit des ressources naturelles au détriment de notre conscience écologique et social, et de notre style !
La pandémie de COVID-19 a mis en lumière de graves défaillances au sein du système mondial de l’industrie de la mode, relevant des problèmes de surstocks, des chaînes d'approvisionnement opaques, une absence de relations saines avec les fournisseurs, et un impact environnemental néfaste dû au modèle « take-make-dispose ». La pandémie est aujourd’hui une opportunité d'apprendre des erreurs du passé, de réévaluer notre mode de consommation et d'accélérer la transition vers une mode durable.
Le vêtement le moins polluant étant celui qu’on ne produit pas, la seconde main est une alternative favorisant la consommation éco responsable. Mais elle a tout de même ses limites. Elle ne doit pas favoriser l’hyperconsommation, et encore moins l’hyperconsommation de marques issues de la fast fashion.
Car non, la seconde main ne sera pas le remède miracle s’il est synonyme d’hyperconsommation. Les prix attractifs et la diversité de l’offre ne doivent pas favoriser le modèle du « take-make-dispose » où l’on consomme et on vend de manière banalisée.
L’achat, même seconde main, doit être raisonné et naitre dans l’optique de consommer le moins possible.
Car nous, consommateur, dictons le marché de la mode. Moins nous achetons, moins les big Players de la mode produiront. Plus nous attachons de l’importance à la composition du vêtement et à son approvisionnement, plus ils s’adapteront à nos exigences.
Changeons nos habitudes, pas la planète.